LAO SIU LEUNG PAK MEI KUNE

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jeudi 15 mars 2018

Le bien fondé de la pratique des formes, les Tao Lu 套路

   
Tao Lu

                      L’étude des formes est une des partie intégrante de l’art martial ancien. Dans cette nouvelle ère, nous pouvons naturellement nous questionner sur leur bien fondé et sur leur réelle utilité.
La question n’est pas tant de savoir si vous aimez pratiquer les formes, mais plutôt de déterminer leur importance dans le développement de vos qualités de combattants.

Donc la pratique des formes est-elle un cérémonial suranné n’ayant finalement pas autant d’intérêt que ce que les écoles de Wushu lui attribuent de nos jours ?

Les Tao Lu, sont des enchaînements de mouvements, une sorte de code à suivre pour s’approprier un système de combat en suivant sa stratégie spécifique. Comme je l’ai déjà mentionné à diverses reprises, ces enchaînements sont le répertoire technique du système. Leur intérêt réside majoritairement dans l’apprentissage des techniques du système étudié.

Elles forment également le corps à adopter la structure adéquate. Chaque style est différent et ces différences sont le pilier même sur lequel les formes sont créées. Étant codifiées dans un système d’attaque et de défense prédéterminé, elles enseignent finalement aussi à réagir de façon spontanée, en réaction réflexe.


Les Tao Lu servent donc à :

- Apprendre les techniques du style,
- Former le corps,
- Développer la compréhension et surtout l’utilisation de la stratégie de combat,
- Développer les réactions instinctives.


Diverses écoles

Chaque école a développé des Tao Lu selon ses besoins. Prenant en compte les dangers auxquels les pratiquants devaient faire face, l’endroit dans lequel la boxe devait être utilisée mais également selon la vision de « l’efficacité » qu’avait leur créateur.  

Ainsi, le style Tsai Li Fo (Choy Lee Fut en cantonais) fut créé pour combattre des adversaires en nombre supérieur, la stratégie est basée sur des mouvements en balancier puissants.
Le style Xin Yi Quan est fondé majoritairement sur une force pénétrante directe et les formes sont linéaires.
Le Chuan Quan, la boxe des bateliers se pratique sur « l’emplacement ou un bœuf peut s’allonger » par manque de place sur les bateaux. Les positions sont basses afin d’assurer la stabilité du pratiquant dans les eaux mouvantes. 

Certains styles se pratiquent avec des formes courtes très explosives, tel le Baimei (Pakmei en cantonais). Certaines autres, très longues mais plus lentes, pratiquées plus basses pour développer l’enracinement des membres inférieurs comme le Hongjia (Hung Gar en cantonais). Encore d’autres, longues et rapides, pour développer le stamina tel le Tsai Li Fo (Choy Lee Fut en cantonais). 

Généralement, les déplacements se font, pour les boxes du nord, sur un axe linéaire alors que les systèmes du sud s’articulent autour d’un déplacement en croix.


Pourrons nous utiliser les enchaînements des formes textuellement, à l’identique des formes ?

Bien que ce ne soit pas impossible, la réponse correcte devrait être « difficilement ». Et ce, pour plusieurs raisons.

Le combat, c’est l’adaptation. L’adaptation au changement de situation, l’adaptation immédiate au changement de données. La forme est créée pour donner une réponse A à une attaque B. Si l’attaque arrive, tel que dans une situation donnée d’une de vos formes, il est possible que votre réponse soit immédiate et propre. 
Mais ce genre de configuration idéale ne se rencontre pas toujours. C’est ici que l’assimilation de nombreuses formes provenant D’UN MÊME SYSTÈME est importante.

En effet, il ne s’agit pas de collectionner juste pour le plaisir d’avoir une multitude de formes, mais bien d’amasser suffisamment d’enchaînements différents répondant à des situations et changements multiples.
Un trop grand nombre de forme est difficile à réellement maîtriser par manque de temps, un trop petit nombre ne donnera pas suffisamment de réponses. Ici, nous parlons bien de maîtrise (d’une forme), pas seulement d’apprentissage.

Je tiens d’ailleurs à rappeler que dans le passé, l’élève joignait la classe pour apprendre à se défendre, pas pour saisir l’intégralité du style. C’était suffisant pour une majorité. Le maître n’enseignait d’ailleurs souvent pas les mêmes formes en fonction de l’envie et surtout, de la morphologie de l’élève. Peu accédaient à l’ensemble des connaissances.


Un petit parallèle

Si je devais  faire un parallèle imagé pour décrire l’importance des formes, j’emploierais l’exemple de l’alphabet.

A la petite école, nous apprenons en premier lieu l’alphabet, puis, les syllabes, puis, viennent les mots. Avec ces mots arrivent les phrases. Au départ, nous ne créons pas, nous apprenons à nous servir de ce qui existe déjà. Par la suite, à force de lire, nous pouvons nous-mêmes créer, produire d’autres livres.  C’est un exercice simple, nous écrivons tous les jours, posons des mots les uns à la suite des autres sans cesse et ce, grâce aux bases que sont l’alphabet et la grammaire (les techniques des formes et la stratégie). Nous ne créons pas des mots (mouvements), mais nous créons de nouveaux textes (combos) suivants l’emplacement de ces mots.

Un système bien fondé doit contenir des formes combinant des défenses et des attaques  sous divers angles, des enchaînements créés à partir d’une frappe, se déroulant d’une certaine façon ; dans une autre forme, partant d’une frappe identique à la précédente, mais se déroulant différemment donnant ainsi diverses possibilités de réponse. Ces réponses doivent être infinies.


La séparation des mains

Doit ont pour autant s’y coller intrinsèquement ? 
Si les techniques du système sont contenues dans les formes, toutes les combinaisons possibles n’y sont pas. Nous abordons donc maintenant la pratique du Shou Fa (Sao Fat en cantonais), la loi des mains. Il est question maintenant de créer de nouveaux combos avec un partenaire, suivant la stratégie de combat et les règles que les formes nous ont inculquées.
 La création se fait donc de façon stratégique, nous n’enchaînons pas n’importe quoi avec n’importe quoi,  nous devons créer en suivant la grammaire, en toute logique.


Un code brouillé ?

Un certain nombre de pratiquants avancent que leur système fût créé dans un souci de protection des techniques. Les applications seraient donc bien cachées dans les enchaînements. Je ne pense personnellement pas que ce fut réellement le cas, et s’il en est, c’est complètement aberrant. 
Comme précité, la valeur première des enchaînements et d’inculquer à l’adepte à avoir des réponses réflexes lors d’une confrontation. Dans ce cas, le pratiquant s’entraînerait sans relâche à répéter des mouvements qu’il devrait finalement changer ou  adapter au moment de l’affrontement, sous stress, pour coller à la réaction de l’ennemi ? C’est anti-pédagogique, anti-pragmatique et totalement absurde d’un point de vue de la mécanique réflexe.
Je pense pour ma part que ce sont des systèmes mal créés et pour preuve, il résulte généralement de ces écoles une pratique de type Kick boxing en guise de combat ; l’impossibilité d’appliquer faisant état.

En bref, si le code est trop crypté, on finit par ne même plus savoir le lire.

La forme est donc l’essence du style, son alphabet, un bien nécessaire dans l’apprentissage de ce que l’on nomme « Arts Martiaux ».  

2 commentaires:

  1. Thanks Sifu for this article. Very intersting, because, in this lines I can find many ideas that I already had. Now is more clearly for me. Thanks again!

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  2. Le concept de Taolu est un peu différent dans les arts du nord, et encore plus dans les arts internes, je dirais. En grossissant beaucoup le trait, je dirais que si dans le sud, on peut les voir comme un répertoire de technique, dans le nord, ils servent plus à illustrer des principes, et dans les arts internes ce sont plus des suites de postures permettant de travailler sur différents aspects énergétiques ou biomécaniques.

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